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1831-1861 ROSALIE, ENFANT TROUVEE (2/2)

5 août 1861, six heures du matin, deux hommes se présentent à la mairie de Bracieux : Jean Louis François Augustin Aimable FILLAY et Etienne Modeste GANGNADE...

Pas trop vite... revenons à Saint-Aignan où nous avons laissé Rosalie chez les MOUZAY en 1846 ...

Le couple qui a accueilli Rosalie, s’est engagé devant le maire de la commune à se charger de l’enfant et notamment « A ne point le remettre à une autre personne, pour quelque cause que ce soit, sans en avoir reçu du Préposé de l’Administration, l’autorisation écrite au présent Livret, sous peine d’être poursuivie en restitution de l’indemnité de 50 francs ». Pourtant, lors du recensement de 1846 à St Aignan, Rosalie, alors âgée de 15 ans, n’est déjà plus chez les MOUZAY. Elle est domestique à La Cendrinière chez un vigneron : MARINIER Toussain, des voisins de Pierre MOUZAY, le frère de Silvain MOUZAY. Les dit MARINIER ont une petite fille, prénommée également Rosalie, de 2 ans et accueillent aussi un autre enfant trouvé, ERNEST Joseph, 1 an.

Pourquoi ce changement, est-il validé par l’administration ?  On peut en douter car aucune modification n’est notée dans son Livret de Placement, contrairement à ce qu’impose le règlement ?

Pourtant, le livret indique qu’en 1850, en avril et en septembre, le sieur BERRY, Préposé de l’Administration, chargé de la surveillance des enfants pour le Loir-et-Cher a visité la jeune fille. Il  note « Vue, bien portante », par 2 fois. L'a-t-il vraiment vue ? Et où ? Rien n’est précisé.

Qu’est devenue ensuite la jeune fille ? Aucune information ne nous est parvenue entre 1850 et 1861. Où vivent les MOUZAY ? Se sont-ils loués dans une commune voisine ? Rosalie est-elle avec eux ou placée ailleurs ? Dans tous les cas, elle ne vit pas sur la commune de Saint-Aignan, les recensements de 1851 et 1856 en attestent.

C’est à l’été 1861 que nous retrouvons la trace de Rosalie, à Bracieux, cette fois : elle a 30 ans, elle est domestique chez un marchand de balais, Etienne GANGNADE. Elle est toujours célibataire.

5 août 1861, six heures du matin, les sieurs FILLAY et GANGNADE entrent à la mairie. Ils viennent déclarer le décès de Rosalie la nuit même mais aussi la naissance d’un enfant FOUILLOY, mort-né, le 4 août 1861 à 9 h du soir, au domicile du sieur GANGNADE : Rosalie est morte en couches !

Bracieux, place du Champ Jobert, début XXe
Qui sont ces deux témoins ? Tous deux sont Braciliens et habitent place du Champ Jobert, mais leur position sociale diffère quelque peu :
-        - Jean Louis François Augustin Aimable FILLAY a 43 ans. Il a démarré sa vie professionnelle comme cafetier et il est maintenant maréchal expert (on dirait aujourd’hui vétérinaire équin). C’est un « notable », longtemps conseiller municipal, il est le futur grand-père d’Hubert FILLAY. Il est marié à Claire-Odile BERTHEAU, 41 ans. 2 enfants vivent au foyer : Auguste, 19 ans et Marie, 12 ans. L’autre fils, Louis Théodule Alexandre, 17 ans, celui qui deviendra le père de Hubert FILLAY, doit être interne quelque part.
-        -  Etienne Modeste GANGNADE, 59 ans, est, à cette époque, marchand de balais.  Originaire de Neuvy, il a été fendeur puis scieur de long. Il s’est marié avec une couturière, Françoise AMIOT, en 1828 mais rapidement veuf, il a épousé Silvine Catherine DAVID de Vernou, avec laquelle il vit toujours. Il a eu un fils de son 1er mariage, Pierre Modeste (1829) et une fille, Silvine, du 2ème (1836). Ni lui, ni sa femme ne savent écrire.

-       Depuis quand Rosalie travaillait-elle chez GANGNADE ? Elle n’apparaît pas dans le recensement de 1856 mais pas non plus dans celui de mai 1861. Où peut-elle être, elle qui n’a pas de famille, pourquoi n’est-elle pas chez son patron ?

-   Le registre de décès mentionne juste avant la déclaration de décès de Rosalie, le décès d'un enfant FOUILLOY mort-né quelques heures avant, un petit garçon. Rosalie est morte en couches ...

L  Beaucoup de questions restent sans réponse : qui est le père du petit garçon mort-né FOUILLOY ? Pourquoi le maire note-t-il sur le livret de placement que Rosalie est décédée chez le sieur FILLAY alors que l'acte de décès fait référence au domicile du sieur GANGNADE : confusion, lapsus ?

Rosalie n’a pas de famille et ce n’est pas son employeur qui se charge des frais d’inhumation, c'est la mairie. En août, l’administration hospitalière autorise le maire à vendre les effets de Rosalie pour faire face aux frais d’obsèques. En cas de reliquat, il doit être retourné à la Caisse de l’administration de l’Assistance publique de Paris …

Triste vie, triste fin.

Sources :
-          Archives communales (Bracieux)
-          Registre d’état-civil, recensements de population (archives communales Bracieux)
-          Répertoire d’admission des enfants assistés de la Seine (cote D2HET66, Archives de Paris)
-          Recensement de population de St Aignan (41)
-          Archives départementales en ligne (Loir-et-Cher)
-          Rapports au conseil général des hospices de Paris sur le service des enfants trouvés du département de la Seine, E. J. Bailly (Paris), 1845 
           Décret Impérial du 19 janvier 1811 concernant les Enfants trouvés

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